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La grande distribution alimentaire cherche son modèle d’innovation

Alors que le modèle actuel de la grande distribution alimentaire, inventé après-guerre et basé sur le discount, s’essoufle, la grande distribution alimentaire cherche son modèle d’innovation. Sollicité pour Hop!Liste, un investisseur me dit ceci de la grande distribution: “nous sommes sceptiques sur [les distributeurs et les marques] – en général des clients durs et peu fidèles selon notre expérience”. Bref, le secteur est connu comme le loup blanc par les investisseurs. Dans ce contexte, comment alimenter en énergie et en créativité un secteur qui va devoir investir dans des nouvelles solutions de commerce ?

Un article récent pointait déjà un bien curieux phénomène chez les distributeurs : certains avaient jusqu’à 12 applis à leur nom sur les App Store, la plupart étant sans doute très peu utilisées. Ajoutons que la plupart de ces applis ne fonctionnant pas sans connexion, on doutera de leur utilité dans le magasin, où les ondes passent difficilement à travers les rayonnages métalliques.

En terme d’organisation, cette gamme illisible d’applis mobiles a une raison très simple : chacun y va de son idée et l’appli mobile n’est que l’aboutissement d’un processus en silo dédié à la fonctionnalité. C’est pourquoi les distributeurs doivent sortir de la fonctionnalité pour réfléchir à l’expérience, y compris hors magasin. Il faut faire du design, pas au sens de l’esthétique, mais au sens des méthodologies. Les distributeurs verront alors que le magasin n’est pas au centre de l’expérience, mais juste un point de passage. Et ils pourront mettre une stratégie numérique au service de l’omni-canal. Hop!Liste a été pensé de la sorte, pour être au service de l’écosystème, s’intégrer simplement dans les applis des distributeurs, comme des sites de marque, et apporter des informations pertinentes pour mesurer la performance du digital.

Certains distributeurs ont investi jusqu’à 500M€ pour faire des Drives non rentables, alors qu’une bonne API aurait permis de réutiliser l’actif magasin pour un service de livraison à domicile. Les marques ne fournissent toujours pas leurs fiches produits pour une utilisation libre sur le net, malgré les initiatives qui leur tendent les bras, s’interdisant un marketing gratuit de la part de la blogosphère.

Pendant ce temps, Amazon avance ses pions. Son modèle de distributeur pure-player (et non rentable!) a certes ses limites, notamment en ce qui concerne la livraison. Mais leur savoir-faire en design et en intégration des technologies impressionne. Le Dash est leur dernière trouvaille : une douchette belle et simple, pratique pour permettre à toute la famille de lister ses besoins d’achat. Et dans la foulée, pour Amazon:

  • se concentrer sur le e-merchandizing pour des achats non prévus sur la landing page, au lieu de pousser des catégories dont le client a de toute façon besoin, dont la douchette s’occupe très bien.
  • “Capturer” le client en offrant une certaine facilité d’usage et une ergonomie qui semble faite pour la cuisine : pas de problème pour utiliser le Dash avec des mains qui viennent de malaxer une pate à pain. C’est un avantage sur le mobile.

Amazon Dash est à voir comme un test grandeur nature, fait pour mieux connaitre les usages et faire envie d’être client. Mais à 60€HT de cout estimé par douchette, gageons que la disponibilité va rester limitée quelques temps. De plus, Dash n’est pas parfait:

  • la liste de courses n’est pas un espace naturel pour un distributeur: Peu de consommateurs veulent choisir leur distributeur ex ante, avant de savoir tout ce qu’ils vont mettre dans leur caddie.
  • L’approche du collaboratif : toute la famille peut utiliser le Dash, certes, mais une seule liste de course y est connectée. C’est donc toujours la même personne qui doit passer la commande. Inconvénient sans doute mineur dans le numérique, mais très gênant en omnicanal.

Cela fait plus de cinq ans qu’Amazon s’essaie aux courses en ligne. 2014 devrait être l’année du déploiement, et “les services d’Amazon généralisés ont vocation à être présents en Europe”, selon Jeff Bezos. La France possède de grands distributeurs de taille mondiale, qui ont les moyens de riposter. Encore faudrait-il se mettre en ordre de marche:

  • accepter d’avoir une place dans l’écosystème, plutôt que d’imaginer un client qui ne sort jamais du magasin. Un consommateur fréquente 5 à 6 canaux de distribution par mois en moyenne ! Il n’est pas stratégique de contrôler la liste de courses, il est stratégique de la connaitre. Hop!Liste est là pour ça.
  • travailler sur une appli magasin, une seule!, mais une vraie. La liste de courses n’en est pas la finalité, mais c’en est le point de départ essentiel. Hop!Liste est là pour ça.
  • mettre en place les processus et les KPI pour piloter sa présence numérique, et en finir avec l’empirisme. Avec cette promotion en rayon, combien de clients ont changé d’avis, acheté dans une catégorie non prévue ou profité d’un effet d’aubaine ? Le numérique permet de le mesurer. Hop!Liste est là pour ça.
  • travailler avec les marques pour leur permettre d’utiliser le digital pour le marketing. L’industrie a une dépense anormalement basse dans le numérique, car les outils actuels sont inadaptés et la performance difficilement mesurable. On n’achète pas chez Carrefour comme chez Darty — on a pourtant les mêmes sites Internet ! Là aussi, Hop!Liste est là pour ça.

Amazon et consors arrivent, avec des services pensés pour le consommateur connecté, et non autour du magasin. Les méthodologies existent pour développer des services innovants tout en identifiant les compétences à développer, celles à sanctuariser ou au contraire à externaliser. Des pays comme la Chine, où l’e-commerce pèse plus qu’aux Etats-Unis, ont déjà pris des habitudes de consommation sans l’influence du grand magasin. Il est temps pour la grande distribution alimentaire de réfléchir de façon autonome, d’observer son client, et de faire sa mue vers un modèle plus ouvert, en échange d’une influence sur le parcours d’achat de bout en bout, au service du consommateur. Des sociétés comme HOPSYS sont là pour vous aider à faire cette mue, pour mixer marketing, technologies et (surtout!) bon sens.

A quoi servent les comparateurs de drive ?

Dans le sillage du développement fulgurant des drives en France, sont apparus des sites Internet indépendants permettant de comparer les prix des Drives.  Ces comparateurs de drives cherchent à détourner le trafic des drives pour devenir un passage privilégié dans le parcours client — rôle qu’ils espèrent rémunérateur. D’où la question : quelle est leur utilité, et tiennent-ils leurs promesses ? Bref, à quoi servent les comparateurs de drive ?

Comme toujours pour jauger de l’intérêt d’un service, il faut partir du client. Que veut-il ? Le client de drive veut gagner du temps sans payer plus cher. D’abord adopté par la “digital mum”, la clientèle s’est largement élargie depuis 2011, pour devenir un service intégré aux habitudes d’achat. Premier challenge : le comparateur de drive, qui est une étape en plus, doit être pratique et éviter de faire perdre du temps. Voire, il devrait intégrer l’étape de finalisation de la commande pour éviter de donner l’impression d’être une étape en plus.

Il faut choisir son drive en début de parcours dans un comparateur de drive !
Il faut choisir son drive en début de parcours dans un comparateur de drive !

Ensuite vient la promesse. Que disent les comparateurs ? Qu’en comparant les drives on fera des économies. On s’imagine alors qu’en utilisant un comparateur, on fait sa liste de courses, qui contient les besoins d’achat, puis que le comparateur nous dira où aller acheter au mieux. Que nenni : on commence le parcours en choisissant son enseigne ! D’où une première interrogation : au-delà d’ajouter une étape avant la constitution de la liste, le choix du magasin a priori génère un doute sur la promesse, donc du stress dans l’utilisation du service : si je choisis mon magasin tout de suite, que vais-je vraiment comparer ?

Troisième point : quel intérêt pour les distributeurs ? En effet, un comparateur a tendance à faire baisser les prix, et autant dire ce n’est jamais bien accueillie par un commerçant, surtout sur une activité structurellement déficitaire. Si ces sites ne sont pas tout simplement bloqués par les distributeurs, c’est donc qu’ils y voient un intérêt. Peuvent-ils leur amener des clients ? On imagine mal qu’une start-up puisse construire une marque telle que sa brand awareness dépasserait celle d’une grande enseigne de distribution !  En fait, les marges des drives étant très faibles, voire négatives, certains comparateurs ont renoncé à demander une part du chiffre d’affaires généré. Le modèle doit donc se financer auprès des marques. Mais alors le comparateur est-il vraiment l’ami du consommateur ? Rien n’est moins sûr.

En fait, le comparateur de drive a une mission d’innovation qui devra à terme être intégrée aux applis web et mobiles de distributeurs : faire progresser le chiffre d’affaires. En effet, on estime à 30% d’un caddie moyen la part d’achats non prévus. Ce sont soit des achats-plaisirs, soit des besoins oubliés sur la liste de courses. Rien de tel dans un drive, où le parcours d’achat est fait pour le ré-achat. Une part substantielle du panier final découle d’une liste de produits préférés que l’élague du superflu. Le rôle du comparateur de drive réside donc dans le recrutement de clients ouverts à un nouveau parcours d’achat, pour le ré-inventer, avant généralisation sur les sites des distributeurs. Parions même que leurs revenus viendront principalement de la vente de briques techniques vendues aux distributeurs !

Le drive : une vision fermée de la distribution

Le drive a connu un développement remarquable ces dernières années pour atteindre 6 à 7% du chiffre d’affaires des distributeurs alimentaires. Pourtant, c’est un jeu de dupe qui a donné lieu à ce développement; on prête la formule à George Plassat: “en ne faisant pas de drive, on perd des parts de marché, quand en en faisant on perd de l’argent”. On remarquera d’ailleurs le peu de réactions quand le gouvernement a annoncé la régulation de l’implantation de nouveaux drives : c’est plutôt un 0uf! de soulagement qu’il fallait entendre. Or, si l’expansion du drive était une course aux parts de marché au détriment de la rentabilité, il a mis un besoin en évidence : certains consommateurs veulent faire leurs courses depuis chez eux. Le drive est-il la seule réponse possible à ce besoin ? Nous prétendons qu’il est surtout révélateur d’une vision fermée de la distribution.

Tout d’abord, rappelons que la France possède un solide réseau de distribution alimentaire: la FCD compte 11 000 points de vente hyper, super et Hard Discount, soit 1 pour 6 000 français environ. Et il faut bien voir l’énorme quantité de travail réalisée gratuitement par le consommateur dans ces magasins : il prend le produit pour le mettre dans son caddie, l’en ressort pour le passer en caisse, l’y remet pour aller à sa voiture, puis le sort de sa voiture pour l’emmener chez lui. Tout ce travail a un coût lorsqu’il faut préparer la commande pour le consommateur, soit à la main (Super U, Intermarché) soit dans des entrepôts dédiés partiellement ou totalement mécanisés (Leclerc, Auchan, Carrefour). En ce sens, tant que le processus de préparation de commande dans le drive n’est pas moins cher que les coûts évités (caissières…), le drive est moins rentable, à iso-prix, que le bon vieux magasin.

A ce titre, il est remarquable de voir que le drive n’est pas le concept le plus en vogue dans les autres pays pour permettre au client de préparer sa commande depuis chez soi. En Californie, InstaCart a mis au point un système astucieux de livreurs qui vont dans les magasins existants pour préparer des commandes. La préparation de commande reste gratuite pour les magasins, le livreur peut en visiter plusieurs pour le même client, et le client n’a pas besoin de se déplacer. La livraison reste payante (quelques $…), mais elle ne prend que 2 heures ! Instacart présente les assortiments produits de 3 chaines de magasins selon la localité du client, envoie un livreur faire le pick-up et vous livre en deux heures. Comparé au drive, Instacart est bénéfique au distributeur : pas de nouvel entrepôt (avec son stock…) ou d’embauche à faire, les magasins sont gagnants à tous les coups, ça n’est que du CA supplémentaire.

Pourquoi un tel système n’est-il pas disponible en France ? Simple : aucun distributeur ne partage son assortiment. Encore moins quand il s’agit d’être potentiellement comparé sur un site Internet. Espérons néanmoins que des magasins “raisonnables” tenteront l’expérience avec des acteurs indépendants. Car il ne peut s’agir de l’initiative isolée d’un seul distributeur : InstaCart par un distributeur sur une seule enseigne ne serait que du supermarché en ligne avec les coûts du drive, plus la livraison !

L’économie collaborative est une formidable force d’innovation servicielle. La Ruche Qui Dit Oui le montre tous les jours. Collaborer veut dire animer une communauté et s’ouvrir au monde. On lance le covoiturage pour les drives, qui enrichit le service du drive mais sans en réduire les coûts. Ne serait-il pas plus simple de faire comme Tesco en Angleterre, qui n’est pas particulièrement connu pour avoir une mauvaise stratégie, et commencer à ouvrir des API permettant de connaitre les produits vendus en magasin ? Quel commerçant a peur de montrer ce qu’il vend ?

Allez, messieurs les distributeurs: faites confiance à votre communauté de consommateurs pour améliorer votre part de marché. Une stratégie non collaborative et verticalement intégrée vous isolera fatalement de vos clients.